J'ai lu...Guide sur tous les chevaux du Monde d'Elise Rousseau
Cet ouvrage constitue à ce jour
l'encyclopédie la plus complète sur les chevaux du monde avec plus de 600
illustrations inédites, d'une précision naturaliste inégalée.
Ce livre c'est : Tous les chevaux du monde, près de 570 races et types décrits et illustrés, Elise Rousseau, illustrations Yann Le Bris, aux éditions Delachaux et Niestlé, 544 p.
Des chevaux dont on ne soupçonne
même pas l'existence. Les chevaux de l'île de Sable, les sibériens qui résistent
à -50°, les races d'Asie centrale aux reflets d'or. Et bien sûr, les races
populaires connues : les frisons, les quarter-horses, les pur-sang...
Le guide est disponible en France. Il a été traduit en anglais et en allemand. Il est sorti ces jours-ci aux Etats-Unis.
L'auteure : Elise Rousseau
Elise Rousseau est auteur et journaliste, sur des sujets liés à l’environnement, à la biodiversité sauvage et domestique. Pour les besoins de ses livres ou de ses articles, elle est aussi photographe. De plus en plus souvent, pour illustrer certains de ses ouvrages plus humoristiques, elle prend aussi ses crayons pour dessiner. Une journée par semaine, elle met sa plume au service de la protection de l’environnement, à travers des activités de communication. Passionnée par les chevaux et leur diversité, elle leur a déjà dédié de nombreux livres. Cavalière depuis l’enfance, elle vit au contact quotidien des chevaux, tout en consacrant ses voyages à la découverte de races rares et lointaines.
Comment est venue
l'idée de ce livre sur tous les chevaux du Monde ?
Je crois que cela remonte à
l’enfance. Comme j’aimais les chevaux, quelqu’un m’avait offert un guide des
races. Je ne cessais de le lire, pour choisir la race que je voulais avoir,
plus tard. Cela me faisait rêver. Je m’intéressais aussi beaucoup aux articles
de Jean-Louis Gouraud, qui le premier a fait connaître des races alors
méconnues, comme le barbe, l’akhal-téké, le karbardin.
Bien des années plus
tard, quand je suis devenue auteure, les éditions Delachaux et Niestlé, qui souhaitaient
réaliser depuis quelques temps un guide des chevaux du monde, ne parvenaient
pas à trouver un expert pour rédiger ce livre. Certains spécialistes
déclinaient, d’autres trouvaient cela trop compliqué. Quand on m’a posé la
question, j’ai eu envie de relever le défi, un peu inconsciente : je ne
savais pas vraiment dans quoi je mettais les pieds. Si j’avais su que cela
allait me prendre des années, sans vacances, sans week-ends, à y consacrer mes
jours et une partie de mes nuits, à ne faire que travailler jusqu’à
l’épuisement et me pourrir autant la vie, c’est sûr que j’aurais dit non !
Mais avec le recul, je suis heureuse de l’avoir fait car j’ai eu de nombreux
témoignages, y compris de chercheurs, sur l’utilité de ce livre, qui est
désormais traduit en Allemagne et aux États-Unis, et qui est devenu un ouvrage
de référence.
Il a changé à jamais mon regard sur les chevaux et les peuples
cavaliers. Et il a généré de belles aventures à travers le monde, quand par
exemple je suis allée visiter un ranch perdu dans la jungle, au Pantanal, ou
quand je me suis rendue sur une île, en Corée du Sud, rien que pour aller voir
une race rare !
La présentation du livre
Il se présente par petites
monographies.
Toutes les races de chevaux actuellement connues sont citées. A
peu près 65 % des races sont illustrées. C’est une première car beaucoup d’entre
elles ne l'avaient jamais été. Le texte décrit morphologiquement les chevaux,
les usages qu’on en fait, les caractères qu'ils ont, leur histoire, comment la
race s'est créée. Le livre est divisé en grandes zones géographiques, puis les
races sont classées par pays.
Comment avez-vous dirigé vos
recherches ?
Même si j’ai, dans ma vie, eu la
chance de visiter des dizaines de pays et presque tous les continents, il était
bien sûr impossible, en terme de temps et financièrement, d’aller voir sur
place toutes les races du monde.
Ma recherche s’est donc appuyée sur les
livres, la documentation existante, les sites web souvent très bien faits des
associations de race, et surtout sur les rapports agricoles de la FAO, qui se
sont révélés incontournables. Il a fallu éplucher des centaines de rapports,
dans des langues différentes, ce qui n’était pas évident.
Pour une race tibétaine, j’ai aussi fait rouvrir les archives d’un explorateur, à la
Bibliothèque nationale de France : des journées de recherche assez
incroyables où j’avais le sentiment d’être Adèle Blanc-Sec, avec tous ces
chercheurs et ces bibliothécaires qui semblaient sortir tout droit d’une bande
dessinée !
J’ai aussi beaucoup échangé en direct avec des contacts dans
les pays, sur place : personnes travaillant dans les ministères agricoles,
éleveurs, associations de race, vétérinaires, etc. Ils ont été d’une aide
précieuse !
Ensuite, à chaque voyage, je vais voir des races de chevaux,
encore aujourd’hui : impossible d’aller dans un pays sans jeter un œil aux
équidés locaux. Mais il y aurait encore tant de choses à savoir, d’informations
à affiner !
Comment a travaillé Yann Le Bris
pour les illustrations ?
D’abord j’ai voulu travailler
avec Yann car je savais qu’il dessinait très bien les chevaux, ce qui n’est pas
si courant que cela. Et comme il est dessinateur naturaliste, je savais aussi qu’il
apporterait à l’ouvrage sa rigueur scientifique. Ensuite il a beaucoup
travaillé à partir de documents que je lui ai fournis, que j’ai accumulés au
cours de mes recherches, ou bien que mes contacts sur place m’envoyaient.
Cela
n’a rien d’évident d’illustrer des races de chevaux car, finalement, beaucoup
se ressemblent pas mal… Allez faire la différence entre un comtois ou un
hispano-breton, en dehors de leur environnement, ce n’est pas facile !
Yann
et moi, nous avons beaucoup parlé de ses dessins, certaines races allaient de
soi, d’autres étaient plus difficiles à réaliser. En effet, pour certaines
races très rares du bout du monde, il n’existe presque pas de photos. Il lui fallait
donc partir de presque rien, de mauvais documents et de ma seule description,
ce qui n’était vraiment pas facile pour lui. Il voulait toujours faire mieux.
Je pense que si l’éditrice n’avait pas été là pour nous obliger à rendre le
texte et les dessins, on serait encore en train d’y réfléchir !
Il est le
premier au monde à avoir illustré tout un tas de races qui ne l’avaient jamais
été, à avoir dessiné certains détails très particuliers (les tâches à l’épaule
du yakoute par exemple).
Quelle race avez-vous découverte
?
Beaucoup ! Faites-le test
avec les cavaliers, en réalité ils ne connaissent que quelques races, quelques
dizaines tout au plus pour les plus intéressés par la question. La moitié des
races du monde sont à petits effectifs, méconnues même dans leur propre pays.
Par exemple, qui connait les races chinoises ? Je vais vous raconter une
anecdote. J’étais au Salon du cheval l’an dernier, pour dédicacer mes ouvrages.
A côté de moi se trouvait un collègue écrivain équestre, une sommité qui en
connait un rayon sur les chevaux. Il prend le guide, le regarde, feuillette la
partie sur l’Asie et fait une petite moue. « Mouais,
les races de chevaux chinois… tu crois qu’il y a vraiment des races en
Chine ? ». Je commence à me lancer dans des explications.
Quelques temps plus tard, nous sommes toujours assis à notre table de dédicace,
quand - coup du sort - débarquent deux Chinois, accompagnés d’un marchand de
chevaux français, qui m’explique qu’il s’agit là de deux éleveurs chinois
réputés. Les Chinois feuillètent attentivement le guide, arrivent à la partie
sur la Chine et commencent à s’extasier : « ah, erlunchun, ah, yili ! ».
Ce sont justement des races qu’ils élèvent, d’autres qu’ils connaissent ! Ils
sont ravis de trouver un livre qui parle de leurs races chinoises de chevaux,
ils l’achètent, me laissent leur adresse mail pour échanger des photos des
races, etc. Je me retourne vers mon collègue écrivain et je lui fais un clin
d’œil « Alors ? Il n’y a pas de
races de chevaux, en Chine ? ». Il est mort de rire « Alors là, chapeau, vraiment, bravo,
le coup des Chinois, tu m’as scotché !».
En fait, lors de l’écriture
du guide, j’avais obtenu toutes les infos sur les races chinoises directement
par le Ministère de l’agriculture chinois. Mais la réaction de mon collègue est
en réalité assez courante : on n’imagine pas le nombre incroyable de races
de chevaux qu’il y a dans le monde, simplement parce qu’on ne les connait
pas ! Mais il existe de nombreuses races russes, japonaises,
sud-américaines, etc.
Quelle race vous a le plus
intriguée ?
Sans conteste, le transbaïkal, un
cheval frisé que l’on trouve en Transbaïkalie (en Russie). Il n’en reste que
300 environ. Non seulement il est frisé (ce qui lui permet de résister, en
hiver, à des températures extrêmes), mais il a aussi des couleurs très variées
(y compris tachetée).
Enfin, il est porteur d’une étonnante marque à l’épaule, qu’on retrouve
seulement chez les chevaux yakoutes et mongols. Elle serait un marqueur
génétique de l’apport, à un moment ou à un autre de leur histoire, de sang
Przewalski.
En effet, le cheval sauvage de Przewalski est lui aussi porteur de
cette marque. Des Japonais et des Mongols avaient fait des études là-dessus,
mais ils ne savaient pas que cette marque existait aussi chez le cheval
Transbaïkal (tout simplement, d’ailleurs, parce que je pense qu’ils ne
connaissaient pas l’existence du cheval Transbaïkal !), et j’ai découvert
cela en écrivant ce livre. Cela a fait l’objet d’un article dans la Revue
d’ethnozootechnie.
Quelle est votre approche des
chevaux ?
J’aime tous les animaux, mais les
chevaux ont quelque chose en plus, de l’ordre du rêve, de la liberté. L’amour,
c’est toujours emporter quelqu’un sur un cheval, disait Giono. Et, d’une façon
ou d’une autre, les chevaux nous emportent toujours quelque part. Ils sont une
porte ouverte sur l’aventure. Mais je n’aime pas que leur force, j’aime aussi
la timidité des chevaux, leur réserve, peut-être parce que je la partage !
Il faut du temps avec eux, ils ont besoin de relations simples et sereines, et
ça me va bien.
J’aime plus le contact avec les
chevaux que monter à cheval, même si j’apprécie un bon galop sur la plage avec
ma jument camargue ! Je veille à ce qu’ils aient la vie la plus en
adéquation possible avec leur mode de vie naturel. Le cheval est un animal de
grands espaces, fait pour vivre au pré, avec des congénères. Je pratique l’équitation
d’extérieur (balades, randonnées) et je m’amuse un peu à la maison avec des
parcours d’équitation de travail (ma jument camargue semble adorer ça !) mais
toujours avec une approche dite « éthologique » à laquelle j’ajoute
la notion de renforcement positif prônée par Hélène Roche. Tout est basé sur la
motivation, le plaisir réciproque. Je veux que mes chevaux s’amusent avec moi,
que la relation soit harmonieuse. Je pense qu’avec les animaux, comme avec les
êtres humains d’ailleurs, on obtient bien plus par la bienveillance, en prenant
le temps d’expliquer, que par la force. Et quand je vois toute l’affection que
mes chevaux me témoignent, et leur solide amitié envers les êtres humains, je
me dis que c’est réussi. Je suis donc dans le pur loisir, sans autre enjeu que
le plaisir.
D’une façon plus générale, mon
approche des chevaux s’inscrit dans la question de la biodiversité domestique
et de la préservation des races menacées. Quand une race disparaît, c’est tout
un pan génétique qui disparaît, mais c’est aussi tout un pan de l’histoire
humaine, l’histoire des gens qui ont créé cette race, qui ont vécu avec elle.
Bien sûr, certains usages n’existent plus et de ce fait certaines races peinent
à trouver une utilité. Mais je pense qu’il faut, autant que possible, faire en
sorte de préserver au maximum la biodiversité domestique. Cela vaut pour les
chevaux mais aussi pour toutes les autres races d’animaux domestiques, bien
sûr. C’est la raison pour laquelle, à titre personnel, j’ai deux juments camargue, une race peu répandue.
Elise Rousseau pourrait parler encore et encore de ce livre incroyable qu'elle a écrit, découvrez une interview faite au salon Equita de Lyon en 2016.
Suivez le blog d'Elise Rousseau : http://www.lesbiodiversitaires.fr/
Et ses actualités sur sa page Face Book.
Disponible sur Amazon
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