
Carine Schmidlin, photographe équestre et animalier
Bien connue des fidèles du Mag des
Cavaliers Voyageurs, auquel elle contribue régulièrement avec ses
photos de chevaux libres ou montés dans la nature toujours nimbées d’une superbe lumière, la photographe équestre
et animalière Carine Schmidlin, 29 ans, a répondu à nos questions entre
deux reportages.
Chiens et chevaux
Comment
êtes-vous devenue photographe équestre ?
Tout a commencé avec
le dessin et la peinture d’animaux lorsque j’étais enfant.

C’est l’arrivée de
mon berger des Shetland, Zorion, qui m’a donné
envie de démarrer la photographie. J’ai réalisé mes premières photos avec un boîtier
reflex en 2007, mon appareil ne me quittait plus. Mes sujets préférés : chiens
et chevaux.
Après quelques années
de pause, j'ai repris de plus belle en 2017 en décidant de me former auprès de
photographes reconnus dans leur domaine en Europe. Ces formations me
permettent d'affiner peu à peu mon style et, en parallèle, j’expérimente de
nouvelles pratiques comme la vidéo, le studio ou la macrophotographie. Mon portfolio équin
s'est considérablement étoffé ces 3 dernières années
en réalisant mes projets en France et à l’étranger.
Photographier les
chevaux en liberté est ce qui me plaît le plus.

Lorsque j’assiste à des
stages ou des cours d’équitation en tant qu’auditrice, j’en profite pour
capturer les moments forts. Le reportage est un genre qui me plaît également
car il s'agit de saisir le bon moment et d’avoir la capacité d’anticiper les actions
et réactions de sujets qui ne posent pas. Faire la couverture du magazine
Cavalière en 2018 a été pour moi un honneur, c’est LA revue que je suivais depuis de nombreuses années et
dans laquelle je me retrouvais le plus (relation, éthologie et bien-être du
cheval).
Envisagez-vous
d’en
vivre exclusivement un jour ?
L’idée d’en faire mon
métier m’a effectivement traversé l’esprit à de nombreuses reprises, mais ce n’est
aujourd’hui pas quelque chose que j’envisage à court terme. En effet, j’ai un
travail qui me plaît - contrôleuse de gestion - et qui me permet malgré tout de voyager et de réaliser mes projets photographiques.
Vous semblez
attacher une attention particulière à la lumière. Comment travaillez-vous ? En extérieur, en studio… ? Quels sont vos spécificités ou points forts, selon
vous ?
La maîtrise de la
lumière est en effet indispensable pour produire des images de qualité. Je me
suis toujours détournée de la lumière artificielle et encore plus des
environnements « artificiels » comme le studio pour la photographie équine
car cela ne correspondait pas à ma vision de l’animal. Avec les chevaux, je
travaille donc en lumière naturelle, en extérieur, et si je devais citer un
point fort, je dirais ma capacité à prévoir le rendu en fonction des conditions
lumineuses et du placement, chose qui s'acquiert avec la pratique.

Cependant, j’ai
récemment appris à utiliser la lumière artificielle en extérieur en
photographie animalière. Le flash permet d’obtenir des images correctement
exposées et donc à limiter la quantité de retouches… Ce qui est d'ailleurs un
critère d'éligibilité aux concours de
photographie animalière. Posséder le meilleur équipement du moment ne suffira pas à produire des
images d'exception si on ne maîtrise pas les bases de photographie. De la même
manière, s’essayer à d’autres domaines permet d'enrichir son travail de
photographie équine ou animalière.
Retouchez-vous
beaucoup vos photos ?
Photoshop permet aux
photographes de rattraper des photos complètement ratées et
certains n’hésitent pas à montrer
un avant/après retouche de ces photos. Ce n’est pas ma
vision de la photographie et je cherche au contraire à produire des images
brutes soignées. Mis à part pour mes projets spécifiques « créatifs » (exemples : Maléfique, Elfique, Halloween) où je m'autorise de la photomanipulation
(ajout de lumières artificielles féériques, fumée, corbeau, modification de
l'iris), je cherche aujourd'hui à dénaturer le moins possible mes photos « classiques »
en post-traitement qui se résume à : ajuster contraste, luminosité, netteté,
balance des blancs, retirer les poussières, retirer si nécessaire le
licol/longe voire les fils de clôture.

Un bel arrière-plan fait la différence
et je me refuse d’en incorporer un venant d’une autre photographie. De même, je
suis très exigeante sur la sélection des photos et vais plutôt rejeter une
photo que dénaturer des parties du corps du sujet (comme grossir l’encolure,
remplacer la tête, la crinière, etc.). Ainsi, le choix, en
amont, du lieu, des sujets, de la saison et de l’horaire ainsi que la décision
une fois sur place du cadrage, du positionnement et de la gestion de la lumière
sont primordiaux pour obtenir une photo réussie.
Êtes-vous
cavalière vous-même ? Quel est votre parcours équestre, quelles sont
vos disciplines de prédilection ?
Cavalière plutôt tardive, j’ai démarré le club à l’âge de 11 ans jusqu’au Galop 3. Puis je
me suis tournée vers de la demi-pension, entre autres parce que ce
qui m’attirait c’était l’équitation telle que
pratiquée par Pat Parelli. Je me souviens avoir supplié mes
parents pour obtenir le livre « Natural Horsemanship » (en anglais à l’époque)
et j’ai eu la chance de suivre un cours d’équitation éthologique en Suisse (début
des années 2000). Avec les études et l’éloignement
de ma région natale, j’ai dû mettre de côté l’équitation
(et la photographie) pendant quelques années. J'ai retenté le club dix ans après l'obtention de mon Galop 3, en passant
mon Galop 4, mais ce rapport avec
les chevaux ne me convenait pas, c'était une évidence.

Ce que j'aime à cheval ce sont les balades dans la nature, mais en réalité ce que je recherche par
le biais de l'équitation c'est, avant tout, la relation et non
le fait de monter. Comme l'indiquait déjà à l'époque le texte sur mon dessin
illustrant mon rêve de petite fille alors âgée de 7 ans : « Le chien
aboie. Le cheval est joli. Moi, Carine, je promène le cheval. »
Êtes-vous
propriétaire d’un cheval ? Quel mode de vie
souhaitez-vous lui donner ?
Fin 2015, j’ai réalisé l’un de mes rêves : avoir un cheval. Le choix s’est porté sur un Rocky Mountain Horse nommé Sunny. Il est
arrivé à l’âge d’un an et demi, un vrai galopin. C’est lui qui m’a donné l’envie
de reprendre la photographie.Au fil des années,
entre les stages et les lectures (équitation éthologique, enseignants « liberté »,
podologie, etc.) et la réalité des pensions équines en région parisienne, j’ai
pris une décision difficile mais nécessaire pour son bien-être : lui offrir une
vie répondant vraiment aux besoins naturels du cheval.

C’est ainsi que Sunny
vit désormais dans un"paddock paradise" qui a fait ses preuves, à 450 km de mon
domicile. Je lui rends visite une fois par mois et c’est avec un cheval heureux
que je pars en balade. Le concept du "paddock paradise" (inventé par Jaime Jackson) est né de l'observation de troupeaux sauvages aux Etats-Unis et consiste à offrir à nos chevaux « domestiques » un environnement de vie se rapprochant le plus possible des conditions de vie naturelles. (L’objectif étant d’avoir des chevaux heureux et en bonne santé en répondant à leurs besoins naturels : en troupeau, marcher librement au moins 10 kilomètres chaque jour sur des terrains variés pour des pieds forts, trouver une nourriture adaptée tout au long de la piste dont des pâturages maigres.)
Dans combien
de pays vous êtes-vous déjà rendue pour faire des photos de chevaux ? Et de départements français ?
Née dans un
environnement multiculturel (région des trois Frontières
en Alsace), d'une mère Japonaise et d'un
père franco-suisse, j'ai conservé le goût
pour le voyage et la rencontre des autres cultures. J’ai eu l’opportunité
de voyager dans 7 pays étrangers et 21 départements français pour photographier
les chevaux. Une chose est
certaine : j'adore voyager.

Je suis comblée lorsque je combine mes 3 passions :
les animaux, la photographie et les voyages. Prochaine destination
photographie équine : l’Islande ! Et notamment le festival Laufsskálarétt, qui a lieu chaque année et qui est le plus grand rassemblement de chevaux du pays.
Parmi tous
ces pays, lesquels vous ont le plus marquée et touchée ? Quelle réflexion cela vous a-t-il apportée en termes de
découverte de cultures équestres différentes ?
J’ai été marquée par
les réglementations en place pour le bien-être des animaux, notamment en Suisse
et je pense que nous aurions beaucoup à apprendre. En termes d’enrichissement
personnel, ces voyages m'ont permis de faire de belles rencontres et de nouer
des amitiés fortes à des milliers de kilomètres.
Vous faites
aussi des photos animalières, des animaux domestiques à la
faune africaine. Et aussi des photos ultra créatives et originales, comme cette
incroyable série équestre « Halloween ». Qu’aimez-vous dans cette autre forme
de travail ?
Effectivement, je réalise
aussi des séries « créatives » qui sortent de l'ordinaire, comme la série
Maléfique qui a suscité beaucoup
d'intérêt sur Facebook. J’adore imaginer et créer
une mise en scène sur un thème
particulier et notamment ce qui touche au fantastique. Ce qui me plaît avec ce
type de projet est que je peux laisser libre cours à mon imagination et
transmettre ma vision et mes émotions.

En fonction du thème,
je vais alors chercher les modèles adéquats, un lieu qui représente au mieux le
thème, déterminer la meilleure saison et horaire, trouver les tenues, les
parures (souvent fournies par Mélanie Caherec, créatrice de cuirs) et selon le
cas, trouver un(e) Make-up artist. Je m'autorise de la photomanipulation*
additive exclusivement dans ce type de shooting qui relève davantage du « digital art »
que
de
la photographie.

C'est en étant pointilleuse sur les détails que je parviens à obtenir
les résultats souhaités. *photomanipulation :
intégration d'éléments qui n'étaient pas présents dans l'image d’origine ou « suppression »
d’éléments (vs. retouche : embellir une photo).
Quelle est
(ou quelles sont) la race de chevaux que vous trouvez la plus photogénique ?
Au-delà d’une race en
particulier, je trouve les chevaux avec beaucoup de crinière particulièrement
photogéniques.
Enfin, quels
photographes équestres vous inspirent-ils le plus ? Pour lesquels
avez-vous le plus d’admiration ?
Mes inspirations ont évolué
au cours des années mais aujourd’hui j’admire le travail de Christiane Slawik.
J’espère réaliser de plus en plus de photographies aussi abouties qu’elle sans
avoir à recourir à la retouche sur ordinateur.
Photo édito : Sunny, le beau Rocky Moutain Horse de la photographe © Carine Schmidlin
Plus d’infos
sur le travail de Carine Schmidlin sur son site Internet
Et sa
page facebook
Instagram
: @carine.schmidlin
Ses
coordonnées : carine.schmidlin@icloud.com
Lisez aussi sur le blog d'atures articles superbement illustrés par Carine Schmidlin :