Sciences : l’étonnante mémoire affective des chevaux
Une étude britannique a révélé que les chevaux pouvaient
décrypter des émotions sur la photo d’un visage humain, et la mémoriser.
Reconnaître un visage sur une photo
Les chevaux se souviennent de l’expression du visage d’un inconnu
vu en photo quelques heures plus tôt !
C’est ce qu’ont démontré le Professeur
Karen McComb, de l’université du Sussex, et le Docteur Leanne Proops, de l’université
de Portsmouth, deux spécialistes du comportement animal. Leur étude confirme
que lorsqu’ils voient « en vrai » un inconnu dont le visage leur a été
présenté quelques heures plus tôt, les chevaux le reconnaissent – sur une photo
couleur de bonne qualité, en format A3 (42 x 29,7 cm).
Mieux encore : les chevaux sont également capables de
se souvenir de l’expression du visage, souriant ou en colère, qu’ils avaient vue
sur la photo - même si l’inconnu qui leur est présenté garde cette fois un visage
neutre.
Vision latérale du cheval
Pour aboutir à cette étonnante conclusion, les deux
scientifiques se sont basés sur une particularité de la vision du cheval, qui
est sa latéralisation. Explications : on sait que la vision du cheval est
latéralisée, c’est-à-dire que grâce à ses deux gros yeux situés sur les côtés, il
couvre un champ visuel très large, d’environ 330 à 340 degrés. En d’autres
termes, la seule partie que le cheval ne voit pas se situe derrière lui, au
niveau de sa croupe - ce qui explique pourquoi il peut botter ou faire un brusque
écart si quelqu’un ou quelque chose survient sans prévenir dans cette zone. C’est
ce qu’on appelle une « zone aveugle » !
Oeil gauche, hémisphère droit...
Les scientifiques savent depuis une vingtaine d’années que
chez différentes espèces animales, l’hémisphère droit du cerveau est
préférentiellement utilisé pour évaluer une menace – autrement dit l’œil gauche,
puisque les nerfs optiques se croisent avant d’aboutir dans le cerveau. Et des
chercheurs de l’université de Cambridge ont également démontré que des moutons
étaient capable de reconnaître les photos des visages de Barack Obama ou de la comédienne Emma Watson !
Dans cette lignée de réflexion, il y a deux ans déjà, Karen
McComb et Leanne Proops avaient à leur
tour démontré que les chevaux présentaient bien ce biais de latéralisation. Et
qu’ils regardaient plus longuement avec leur œil gauche des individus dont le
visage était en colère que ceux qui souriaient… Leur nouvelle étude va donc encore plus loin puisque cette
fois, ce sont le décryptage d’émotions sur la photo d’un visage humain et leur
mémorisation qui ont été démontrés… Un constat directement lié à la vision du
cheval.
Pas moins de 7 muscles oculaires
Petit rappel sur cette vision propre à l’espèce équine :
le globe oculaire du cheval possède pas moins de 7 muscles. On les appelle des
muscles striés. Ce sont eux qui permettent de mobiliser le globe : il y a 4 muscles droits (dorsal,
ventral latéral et médial, permettant des mouvements horizontaux et
verticaux) ; 2 muscles obliques (dorsal et ventral, mettant l’œil en rotation) ; et 1 muscle
rétracteur du bulbe (permettant une rétraction du bulbe dans l’orbite). Voilà pourquoi
l’œil de votre cheval est si profond et expressif !
Perception du monde et comportement
Quant à la position des yeux du cheval sur les côtés, elle a
des conséquences directes sur sa perception du monde qui l’entoure (congénères,
humains…) et donc sur son comportement. Nos
scientifiques britanniques l’ont bien démontré dans leur étude ! Impossible,
donc, de se dire cavalier si l’on ne s’y intéresse pas… En effet, comprendre
comment voit votre cheval vous permet de mieux appréhender ses comportements
dans de nombreuses situations.
Le cheval, animal-proie
Les réactions de votre cheval sont bien souvent dues au fait
qu’il bénéficie de ce champ de vision particulièrement étendu à 330 ou 340
degrés - grâce au positionnement latéral de ses yeux volumineux et à sa pupille
allongée. On peut dire qu'il voit de sa hanche gauche à sa hanche droite. En
comparaison, celui de l’homme avoisine les 190° ! Sur les côtés, sa vision
monoculaire (ce qui est vu par un seul œil), lui permet de distinguer
rapidement tout ce qui est en mouvement - un atout indispensable à cet animal
qui vit en troupeau et qui a un statut de proie. Ainsi, le groupe à l'état
naturel a en permanence une vision panoramique de ce qui l’entoure…
Photo édito : © Leïla Audrey Pagès, auteur du documentaire équestre Sans attache
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